Une série d’expériences historiques : la réaction d’estérification étudiée par Marcellin Berthelot

Bac Polynésie septembre 2024 Sujet 2

Exercice 1 – (9 points) –  Durée 1h35Calculatrice autorisée

Sujet n°24-PYCJ2PO3

EXERCICE 1 – UNE SÉRIE D’EXPÉRIENCES HISTORIQUES : LA RÉACTION D’ESTÉRIFICATION ÉTUDIÉE PAR MARCELLIN BERTHELOT (9 POINTS)

Marcellin Berthelot (1827-1907), auteur de nombreuses découvertes en chimie, est considéré comme l’un des plus grands scientifiques français du dix-neuvième siècle. Avec l’aide de son élève, Léon Péan de Saint-Gilles, il a étudié de manière approfondie la réaction entre un alcool et un acide carboxylique.

L’objectif de cet exercice est de montrer comment la technique du dosage par titrage a permis à Marcellin Berthelot de mettre en évidence les notions de cinétique chimique et d’équilibre chimique.

1.   Dosage par titrage.

Berthelot et Péan de Saint-Gilles ont réalisé un mélange contenant les mêmes quantités de matière en acide éthanoïque et en éthanol laissé à la température ambiante de 20 °C. Il s’est formé de l’éthanoate d’éthyle et de l’eau. La transformation d’estérification qui s’est déroulée était très lente. Elle peut être modélisée par l’équation de réaction suivante :

CH3COOH(ℓ) + C2H5OH(ℓ) ⇄ CH3COOC2H5(ℓ) + H2O(ℓ)

Q1. Représenter la formule semi-développée de l’acide éthanoïque. Entourer et nommer le groupe caractéristique de la molécule. Nommer la famille fonctionnelle à laquelle appartient l’éthanoate d’éthyle.

La transformation s’étant poursuivie pendant quinze jours, un échantillon du mélange réactionnel a alors été prélevé afin de connaître l’évolution des quantités de matière des espèces chimiques en jeu. Pour Marcellin Berthelot : « C’est évidemment l’acide qu’il faut déterminer. On transvase (l’échantillon) dans un vase à fond plat. On ajoute quelques gouttes de teinture de tournesol et l’on verse de l’eau de baryte avec une burette graduée jusqu’à ce que la teinte rose du tournesol ait viré au bleu franc. »

Données :

  • Le vase à fond plat est un erlenmeyer ;
  • La teinture de tournesol est un indicateur coloré acido-basique ;
  • L’eau de baryte est une solution aqueuse d’hydroxyde de baryum : elle contient les ions baryum Ba2+(aq), spectateurs, et les ions hydroxyde HO(aq) ;
  • Couples acide / base mis en jeu : CH3CO2H(ℓ) / CH3CO2(aq) ; H2O(ℓ) / HO(aq).

Q2. Faire un schéma du dosage par titrage réalisé en y indiquant les positions de la solution titrante et de la solution titrée.

Q3. Écrire l’équation de réaction qui modélise la transformation lors du dosage par titrage entre l’acide éthanoïque présent dans l’échantillon et les ions hydroxyde provenant de la burette. Citer au moins une caractéristique que doit posséder toute réaction utilisée pour un dosage par titrage.

Q4. Indiquer la teinte de la forme acide de l’indicateur coloré.

On considère une solution titrante de concentration en quantité de matière cB en ions hydroxyde HO(aq) de valeur égale à 2,0 mol·L–1 et provoquant le changement de couleur pour un volume VBE versé à l’équivalence de valeur égale à 5,0 mL.

Q5. En utilisant la relation entre les quantités de matière à l’équivalence, calculer la valeur de la quantité de matière nA en acide éthanoïque dans l’échantillon titré.

Données :

  • Le volume de l’échantillon Véch vaut un centième du volume du mélange réactionnel initial Vi ;
  • Le dosage par titrage réalisé a montré que 10 % de l’acide initial avait réagi.

Q6. Montrer que ce mélange contenait initialement une quantité de matière d’acide ni de valeur égale à 1,1 mol.

2.    Cinétique chimique.

Les dosages par titrage successifs d’échantillons issus du mélange réactionnel laissé à température ambiante ont permis d’obtenir les résultats du tableau de la figure 1.

Temps écoulé en joursProportion de l’acide initial ayant réagi
1510 %
2214 %
7037 %
7238 %
12847 %
15448 %
27754 %
36855 %

Figure 1. Expérience effectuée à la température T1 = 20 °C.

L’expérience a été reproduite en portant la température T2 du mélange réactionnel à la valeur constante égale à 100 °C. Les résultats obtenus sont présentés dans le tableau de la figure 2.

Temps écoulé en joursProportion de l’acide initial ayant réagi
426 %
937 %
1547 %
3256 %
6060 %
12065 %
15067 %
18067 %

Figure 2. Expérience effectuée à la température T2 = 100 °C.

Q7. Expliquer pourquoi l’ensemble des mesures de Marcellin Berthelot illustrent le fait que la température est un facteur cinétique. Au moins une comparaison quantitative s’appuyant sur les données des tableaux des figures 1 et 2 est attendue.

Q8. Définir le temps de demi-réaction t1/2 d’une transformation chimique. Pour l’expérience à la température T2, donner l’encadrement de la valeur de t1/2 le plus précis possible selon les données de la figure 2, sachant que l’état final est atteint après 150 jours.

Q9. À l’aide du tableau de la figure 1 et de la quantité de matière initiale d’acide ni, montrer qu’après les quinze premiers jours de l’expérience à température ambiante la valeur de la quantité de matière d’acide restant est égale à une mole.

Données :

  • Vitesse volumique moyenne de disparition d’un réactif : $v=\frac{c_{initiale}-c_{finale}}{\Delta t}$ ;
  • Volume initial du mélange réactionnel : Vmélange = 130 mL.

Q10. Calculer la valeur moyenne v de la vitesse volumique de disparition de l’acide, à température ambiante, sur la durée Δt = 15 j. Le résultat sera exprimé en mol·L–1·j–1.

Q11. Expliquer sans calcul comment évolue ensuite la vitesse de disparition de l’acide dans l’expérience se déroulant à 20 °C. Justifier ce comportement à l’aide d’un facteur cinétique autre que la température.

Q12. Proposer une modification du protocole qui permettrait d’accélérer la réaction d’estérification sans changer la température du mélange réactionnel.

3.   Équilibre chimique.

Les expériences décrites dans les deux tableaux précédents ont été prolongées bien au-delà des durées qui y sont indiquées : elles ont montré que le mélange réactionnel n’évoluait plus lorsque 67 % de la quantité de matière d’acide initial avait réagi, quelle que soit sa température.

Dans le mémoire Recherche sur les affinités (1862-1863), Marcellin Berthelot a ainsi pu écrire :

« Il résulte de ces expériences que toutes les fois que l’action d’un acide sur un alcool a été suffisamment prolongée, ou réalisée à une température suffisamment élevée, la composition des systèmes devient sensiblement invariable. On voit en même temps que l’état d’équilibre qui se produit ainsi ne répond jamais à une saturation complète de l’acide par l’alcool ».

Q13. Expliquer, en utilisant la notion d’avancement, la différence entre une réaction totale et une réaction menant à un équilibre chimique. Indiquer l’expression qu’utilise Marcellin Berthelot dans le texte ci-dessus pour parler d’une réaction totale.

Q14. Préciser en quoi le tableau de la figure 2 de mesures à la température T2 permettait déjà de soupçonner l’existence d’un équilibre chimique pour la réaction d’estérification. Citer une partie du texte ci-dessus évoquant l’intérêt de mener l’expérience à la température T2 de valeur égale à 100 °C.

Données :

  • On rappelle l’équation de la réaction modélisant la transformation étudiée : CH3COOH(ℓ) + C2H5OH (ℓ) ⇄ CH3COOC2H5 (ℓ) + H2O(ℓ)
  • On considère un mélange réactionnel initial de volume Vmélange = 130 mL à une température T de valeur égale à 25°C, contenant des quantités de matière identiques en acide et en alcool : nacide = nalcool = 1,1 mol ;
  • Concentration standard en quantité de matière à 25°C : = 1,0 mol·L–1 ;
  • L’eau n’étant pas le solvant, sa concentration en quantité de matière intervient dans l’expression du quotient de réaction.

Q15. Justifier que les concentrations en quantité de matière des quatre espèces chimiques en présence dans l’état d’équilibre ont pour valeur :

[CH3COOH]éq = [C2H5OH]éq = 2,8 mol·L–1 ;
[CH3COOC2H5]éq = [H2O]éq = 5,7 mol·L–1.

Q16. À l’aide des données, établir l’expression du quotient de réaction Q de la réaction d’estérification. Indiquer sa valeur Qi dans l’état initial, puis calculer sa valeur Qéq = K dans l’état d’équilibre chimique.

Q17. Dans son mémoire, Marcellin Berthelot a présenté plusieurs méthodes permettant de faire réagir l’acide éthanoïque et l’éthanol avec un rendement supérieur à 67%. Proposer une méthode possible.